Anouche Gulmez - Directrice artistique - Portfolio

Un univers créé pour se mettre dans la peau d’une personne anosmique, découvrir son quotidien et le handicap. mémoire ølfactive c’est aussi partager son expérience avec une communauté dans le but d’obtenir un maximum d’informations sur le sujet et ainsi pouvoir enrichir les recherches.

L’olfaction est la capacité de sentir les odeurs. Elle dépend du nerf olfactif, 1er nerf crânien. La couche de tissu externe qui recouvre le nerf olfactif capte les molécules chargées d’odeurs au niveau de la muqueuse nasale et les transmet le long des fibres olfactives, jusqu’au bulbe olfactif.

L’odorat est plus ou moins développé selon les individus. Sa perte peut être très gênante (ne pas pouvoir sentir une fuite de gaz ou de la fumée, développer un trouble de l’alimentation…). (1)

Le syndrome de Kallmann est une maladie génétique du développement embryonnaire caractérisée par l’association d’un hypogonadisme [...] et d’une anosmie ou hyposmie (avec hypoplasie ou aplasie des bulbes olfactifs). (2)

Le syndrome Kallmann, qui touche environ un homme sur 10.000 et une femme sur 50.000 est lié à un défaut génétique sur le chromosome X. (3)

Le nerf olfactif est le premier nerf crânien. Son rôle, uniquement sensoriel, est de véhiculer l’odorat. (6)

L’anosmie est un trouble de l’odorat qui se traduit par une perte totale de l’odorat temporaire ou permanente. Ce handicap est fréquemment causé par l’altération du nerf olfactif. L’anosmie est un handicap méconnu qui concerne 10 à 12 % de la population à des degrés divers (2 % ont une perte totale). (5)

L’hyposmie est la perte partielle de l’odorat. Il s’agit d’une altération qualitative et/ou quantitative de l’odorat. L’hyposmie ou l’anosmie peuvent révéler dans de rares cas des pathologies tumorales. (1)

L’hypogonadisme est une variation du développement sexuel résultant d’une perte de fonction au niveau des ovaires ou testicules. (4)

Une hypoplasie est un terme médical employé pour désigner un arrêt de croissance ou un développement insuffisant d’un organe ou d’un tissu. (8)

L’aplasie est un terme médical qui désigne l’absence de cellules ou de tissus. L’aplasie médullaire est une maladie rare, dont l’origine est un dysfonctionnement de la moelle osseuse qui rend cette dernière incapable de produire des cellules sanguines. (7)

L’odorat étant étroitement relié au goût, la plupart des patients perdent en même temps les sensations gustatives des aliments. 92 % présentent ainsi des troubles alimentaires comme l’anorexie mentale.

De plus, les odeurs construisent une partie importante de nos souvenirs et de nos émotions ; l’anosmie peut donc s’accompagner de troubles de la mémoire, d’anxiété et de dépression. La perte d’odorat est plus fréquente avec l’âge : elle toucherait 40 % des personnes âgées. (3)

La dysgueusie est une altération du goût. Souvent associée à l’absence de perception d’odeur, l’altération du goût est fréquemment due à un rhume ou à une inflammation des voies supérieures. L’altération est alors provisoire et disparaît à la guérison de ce qui l’a provoquée. Il existe cependant des dysgueusies et agueusies acquises. (9)

L’agueusie est l’absence du sens du goût. Il s’agit d’un trouble quantitatif de la perception du goût, par opposition à la dysgueusie, qui est un trouble qualitatif. (10)

Arrivent tout un tas de question…

Dans de très rares cas, les bulbes olfactifs sont absents : il s’agit d’anosmie congénitale. L’anosmie peut être liée à un défaut de l’organe nasal ou un problème intracrânien... (11)

L’objectif ici est de faire appel à l’émotion par les souvenirs. Vous est-il déjà arrivé de vous remémorer une odeur rien qu’en fermant les yeux ? Moi, jamais... J’ai une anosmie congénitale. Cela signifie que je suis née sans bulbes olfactifs et donc sans odorat et un sens du goût très peu développé.

Jusqu’à il y a quelques années je ne ressentais rien. Après quelques examens, un traitement léger et un suivi avec un ORL, je commence à sentir certaines choses. Je découvre avec 23 ans de retard les odeurs qui m’entourent : l’odeur du riz, des transports en communs, de la viande, l’odeur des gens, celle de l’ail, …

Je dois donc apprendre à découvrir les odeurs et réapprendre à me nourrir. Je commence à sentir certaines choses mais toutes les odeurs se confondent et je fini par être gênée par la quasi-totalité des odeurs que je sens.

En ayant les yeux fermés je peux facilement confondre l’odeur des transports en commun avec l’odeur d’une entrecôte, l’odeur de l’ail et celle du poisson n’ont aucune différence et l’odeur du désodorisant des WC ressemble à celle du Chanel numéro 5 ! Comment est-ce possible ?

Je me rends surtout compte, maintenant que je sais que j’ai ce handicap, que je ne revis pas mes souvenirs de la même manière qu’une autre personne. Je dois apprendre à vivre avec et à accepter le fait que peut-être je ne sentirais jamais les choses telles qu’elles le sont. Je me dis que peut-être le fait de passer des heures et des heures à regarder de très jolies photos de plats sur Instagram peuvent me réconcilier avec la nourriture.

En attendant manger me frustre. J’ai une base commune avec les personnes dotées d’odorat : je reconnais le sucré, le salé, l’acide et l’amer. À travers ce projet je montre donc ma perception déformée de la nourriture causée mon handicap.

Dans une société de consommation où l’aspect visuel est le critère le plus important, il est difficile de faire la différence entre vrai et faux. Devant la photographie d’un plat « à la Instagram », nos yeux sont satisfaits par le contenu qu’ils voient mais qu’en est-il de nos autres sens ? Comme l’odorat par exemple... Jusqu’où la satisfaction visuelle peut-elle nous transporter ? La mémoire olfactive permet de se souvenir des odeurs déjà senties, mais imaginez si cela n’était pas possible...

Bienvenue dans le quotidien des anosmiques !

Découvrir

Tout a commencé lors d’un banal rendez-vous chez le dentiste pour une prise d’empreinte de mâchoire. Moi, allongée sur la chaise avec la pâte collée aux dents…

Dentiste : ça va ? Le goût n’est pas trop désagréable ?
Moi : Non ça va, ça ne me dérange pas.
Dentiste : Tu es sûre ? Pourtant le goût n’est pas très bon !
Moi : Ah bon ? Je ne ressens aucun goût bizarre…
Dentiste : Tu es enrhumée ?
Moi : Non pourquoi ?

Le dentiste va chercher le flacon d’un produit qui a une odeur désagréable et me le fait sentir.

Dentiste : Et là tu sens ?
Moi : Non.

Le dentiste s’en va à nouveau chercher un flacon soit disant à l’odeur insupportable ! Il me le fait sentir. Je prends une grande inspiration le nez collé au flacon…

Dentiste : Et là ?
Moi : Toujours rien !

Le dentiste va dans son bureau et revient avec la carte de l’un de ses collègues ORL.

Dentiste : Prends rendez-vous dès demain matin ! Dis-lui que tu viens de ma part pour obtenir un rendez-vous le plus vite possible.

De là, commence, les batteries de test : scanner, IRM, échographies, prise de sang… pour au final apprendre que j’étais née sans bulbes olfactifs. Je n’ai donc pas d’odorat !

L’ORL : J’espère que vous n’avez pas de gaz chez vous Madame ?

On m’explique dans un second temps que je peux toutefois parvenir à sentir certaines odeurs si je fais travailler le nerf trijumeau.

Le nerf trijumeau est le cinquième nerf crânien. C’est un nerf « mixte », c’est-à-dire composé à la fois de neurones assurant une fonction motrice (pour mordre, mâcher et avaler) et de neurones sensitifs, plus nombreux, dont la fonction est de recevoir les sensations de toucher, de douleur, ... de la face et d’une partie de la « sphère ORL ». (12)